Je crois que la vérité sur n’importe quel sujet n’apparaît que lorsque toutes les facettes de l’histoire sont mises ensemble, et lorsque leurs différentes significations s’éclairent mutuellement. Chaque écrivain rédige les parties qui manquent à l’histoire d’un autre écrivain. Et l’entière vérité, c’est ce que je suis après.

Walker 1983

Des programmes de Women’s studies, d’études sur le sexe et le genre, ont été créés dans la grande majorité des écoles supérieures et des universités des États-Unis au cours des vingt-cinq dernières années. Bien que la création et la pérennité de ces programmes ont rencontré des résistances,ils ont également obtenu d’innombrables succès. Dans toutes les disciplines universitaires, les programmes de Women’s studies ont sérieusement remis en question les conceptions du genre, de l’ethnicité, de la classe et de la sexualité. Ils ont également revigoré des dialogues entre plusieurs champs d’études – dont beaucoup étaient depuis longtemps fatigués et pollués. En conséquence, il a été l’un des champs académiques qui s’est développé le plus vite. À bien des égards, les études de genre ont changé à jamais le visage du monde universitaire.

Sans doute, une conséquence quelque peu latente mais néanmoins importante de cette transformation a été l’impact que ces Women’s studies (et du féminisme en général) ont eu sur des gens comme moi. Cela signifiait qu’être un homme blanc hétérosexuel issu de la classe moyenne supérieure, c’était être né avec un statut social qui m’a donné des possibilités illimitées pour obtenir des quantités incommensurables de prestige masculin, et le privilège, le pouvoir et le confort qui vont avec. Cependant, au moment où j’entre dans la quarantaine (âge qui confère souvent un autre statut social masculin privilégié dans notre société), je me retrouve secrètement et ouvertement à rejeter les rôles oppressifs qu’une société dominée par les hommes a forgés pour moi, et à les remplacer par une approche féministe et une façon d’être particulière (Schacht et Ewing 1998; Schacht, 2000a).

SteveSCet article explore mes tentatives en tant qu’homme blanc à contribuer de façon utile aux programmes des Women’s studies dans les différents campus où j’ai enseigné, et au mouvement féministe dans son ensemble. Reconnaissant que je dois prendre un chemin différent des femmes pour avoir un regard féministe sur le monde (Schacht et Ewing, 1997), je reconnais également qu’en tant qu’enseignant (pro)feministe, la contribution essentielle que je peux faire pour les Women’s studies est également très différente de celle des enseignantes (Schacht, 2000b). La connaissance pratique que j’apporte dans mes cours est de me placer précisément comme étant celle d’un membre incroyablement privilégié de la société: je suis homme, blanc, hétérosexuel, et issu de la classe moyenne supérieure (Haraway, 1988). Puisqu’être privilégié a diminué de manière significative la probabilité que je sois opprimé – tel que défini par Young (1988), je peux sincèrement prétendre n’avoir aucune expérience de l’oppression – cela a par contre augmenté la probabilité que je sois oppresseur. C’est-à-dire que, par mes actes et ma simple présence, une grande partie de ma vie a consisté à être oppressif envers les autres. En conséquence, une grande partie de mon privilège et de mon statut a été acquis aux dépends de personnes subordonnées dans la société, leur condition réelle et évidente de subordonnées m’étaient nécessaire pour être supérieur et construire ma masculinité : c’était par l’humiliation et l’avilissement des autres (parfois sous la forme de corps meurtris et ensanglantés), par la réaction de terreur et de douleur dans leurs yeux, par l’impuissance typique et l’inefficacité de leur réponse, tout cela me faisait éprouver et croire fallacieusement que j’étais supérieur à tant d’autres.

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