Génocide des Tutsi : 15 d’impunité tranquille pour les présumés coupables français mais l’étau se resserre !

Une nouvelle preuve de l’esprit dans lequel l’État français – concrètement les participants aux conciliabules de ce qu’il est coutume d’appeler le domaine réservé du président – est intervenu au Rwanda et dans la région des grands lacs de 1990 à 1995, c’est-à-dire avant, pendant et après le génocide des Tutsi, vient de paraître au grand jour, dans le dernier numéro du Nouvel Observateur.

L’article de l’hebdomadaire rapporte l’existence d’une note confidentiel défense du commandant de l’opération Amaryllis (opération décidée par l’exécutif français début avril 1994 après que le génocide eût commencé pour, officiellement, évacuer les ressortissants français et européens), le général Poncet, dans laquelle ce dernier informe sa hiérarchie qu’il a bien pris garde à ce que les médias « couvrant » les horreurs du génocide ne filment pas les soldats français qui n’intervenaient pas pour stopper les massacres qui se déroulaient sous leurs yeux. En clair, il écrit qu’il a obéi aux instructions (cf l’ordre d’opération Amaryllis en pièce jointe) qui lui intimaient notamment l’ordre d’adopter « un comportement neutre vis-à-vis des différentes factions rwandaises ».

Cette neutralité quatre étoile est bien évidemment criminelle et elle relève sans le moindre doute du tribunal pénal international. Mais le plus inquiétant, c’est ce qu’elle révèle de nos représentants, de ce qu’ils sont capables de faire et de penser. Car, comme le montre cette note, cette neutralité n’est pas une aberration mais bien le résultat d’un ordre venant des hauts responsables en charge du « dossier » depuis 1990 et qui, particulièrement bien informés à ce titre et aussi en raison d’une coopération très étroite avec les partisans ouverts du génocide, savaient parfaitement qu’un génocide venait de commencer.

L’ironie de l’histoire dans l’épisode du jour, c’est que cette parution dans le Nouvel Observateur trouve son origine dans les turpitudes de la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur née en 2007 de la fusion entre la DST et les renseignements généraux) qui, voulant à tout prix récupérer ce document entre les mains de certaines ONG, n’hésita pas à aller intimider de simples citoyens pour les enjoindre d’être bien gentils. Des agissements qui, il faut s’en réjouir, auront suscité un certain intérêt et assis, s’il en était besoin, l’authenticité du document.

Espérons maintenant que les milliers de documents qui continuent de dormir dans les placards de l’Histoire soient eux aussi un jour publiés. Car si certains esprits sensibles à la propagande mainstream peuvent douter des intentions qui furent celles de leurs « élus », les conclusions à tirer de l’ensemble des pièces connues à ce jour sont strictement sans appel quant à l’implication coupable. Il urge donc que ces responsables soient jugés si l’on ne veut pas que « le plus jamais ça » que nos piètres intellectuels patentés arborent si promptement reste une vaste blague de mauvais goût. Et l’on ne pourra que difficilement compter sur ceux qui parlementent en notre nom et abdiquent systématiquement devant la raison d’État ! La teneur des conclusions de la mission d’information parlementaire de 1998 provoquée sur le sujet et présidée par Paul Quilès, ex obligé de François Mitterrand, l’a bien montré. Elle était de ce tonneau : on a fait des erreurs politiques d’appréciation dans notre politique rwandaise mais à aucun moment, notre action n’a dévié d’une volonté pacifique et philanthropique de trouver des solutions ! La messe était dite et les preuves ou témoins gênants refoulés aux portes de la chambre du peuple. D’ailleurs, que les auteurs de « une guerre noire » (Gabriel Périès, politologue, et David Servenay, journaliste ; La découverte, 2005) se soient vus confier par certains militaires de haut rang qu « ils ont été sympa à la mission Quilès, ils nous ont évité le tribunal pénal international » n’en est-il pas révélateur ?

Alors remplissez votre office dignes journalistes et publiez, informez ! Enragez en citoyens que vous êtes !
Demandez des comptes par exemple sur ce que recouvre cette lettre de remerciement datée du 22 mai 1994 (le génocide a alors débuté il y a près de 2 mois) adressée par le président du gouvernement génocidaire (formé dans les murs de l’ambassade de France, 17 des membres de ce gouvernement seront déférés au tribunal pénal international !), Théodore Sindikubwabo, à François Mitterrand pour le soutien indéfectible (politique, militaire, médiatique et diplomatique) que ce dernier lui a apporté, au nom de la France…

Marc Haus

deux références utiles :

http://www.lanuitrwandaise.net/

http://cec.rwanda.free.fr/