Un Ayrault-Port à Notre-Dame-des-Landes ? Non merci !

Depuis trente ans, ce projet empoisonne la vie de nombre d’habitants vivant au Nord de Nantes. Une première phase de combats militants et juridiques semble s’achever avec l’avis favorable du Conseil d’Etat en janvier 2008.

Une nouvelle phase de lutte s’ouvre. Peut-être sera-t-elle moins légaliste. Encore doit-elle mettre sur la table un contenu plus globalisant, car tout se tient, le social, l’écologie, la politique, l’économie. Or, ici c’est l’économie qui prime sur tout le reste, une économie basée sur la recherche du profit à tout prix et d’un développement sans fin. Ce développement, vendu aujourd’hui sous le label « durable », est en réalité celui du mode de production capitaliste et des entreprises du même nom : il n’a rien à voir avec les besoins de la grande majorité de la population.

Le délire mégalomaniaque des « élites » locales

Le premier point de la profession de foi de la liste Ayrault aux élections municipales est « une métropole européenne, attractive et solidaire ». Solidaire et attractive pour qui ?
Manifestement, il s’agit d’inscrire Nantes et la Loire-Atlantique en tant que mégapole dans le système globalisé où compétitivité, rentabilité, mobilité, fluidité, excellence sont les maîtres mots. Pour cela, rien n’est trop grand. Vive les grosses infrastructures : extension du port autonome, nouvel aéroport, nouvelles autoroutes, nouveaux ponts, etc.
Interrogé il y a deux ans sur les difficultés de circulation à l’entrée de Nantes, Jean-Marc Ayrault répondait sans aucune gêne qu’il faut voir dans ces difficultés « le dynamisme de notre ville ». Quand on vous dit qu’il a la folie des grandeurs. En tout cas, le bien-être de la population n’est pas son objectif.
La mégalomanie de Jean-Marc Ayrault rejoint celle de Jacques Attali, président de la Commission sur la « libération de la croissance », dont la plupart des « propositions » consistent d’une part à créer un monde idyllique pour les « bobos » (pôles d’excellence, infrastructures, villes de haute technologie) et d’autre part à part à rendre ce monde encore plus oppressant pour la masse des exploitéEs en renforçant le pouvoir patronal et la précarité.
Déjà oubliés la grand messe du « Grenelle de l’environnement » et le Prix Nobel accordé aux experts du GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) : simplement, on passe un vernis de « développement durable » et de « commerce équitable » sur des projets particulièrement polluants. Oublié le dérèglement climatique, l’effet de serre, la raréfaction des énergies fossiles, quand un responsable de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Nantes ambitionne de passer à 9 millions de passagers en 2050. Vraiment, la déraison est du côté des gestionnaires, ceux-là même qui prétendent incarner le sérieux et la responsabilité.

Un système fondé sur le gaspillage

Alors que l’aéroport actuel n’est pas saturé (tant mieux !), alors que des aéroports de l’Ouest sont en quasi-faillite (Angers, Saint-Brieuc), les pouvoirs locaux veulent engager pour Notre-Dame-des-Landes des sommes faramineuses (officiellement 580 M€, mais sans doute beaucoup plus, sachant que ce projet en appelle d’autres !).
Gaspillages d’argent et d’énergie, toujours au nom de l’ambition d’une grande métropole. Ayrault voit la population de l’agglomération nantaise augmenter de 10 à 15% d’ici à 2020 (cf site Nantes-Développement). Avec cet objectif, ce sont d’autres infrastructures qu’il va falloir mettre en place, notamment de production d’électricité. Comme l’énergie nucléaire est à la mode dans les discours des dominants, ne verra-t-on pas réapparaître le spectre d’une centrale nucléaire en Basse-Loire ?
Pendant ce temps, des besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits. Les transports locaux sont chers, le logement est inabordable, l’inflation de l’alimentation de base galope. En parallèle, l’argent coule à flot pour les élites.
C’est par nos exigences et nos revendications que nous pourrons réorienter l’argent public, promouvoir la gratuité des transports locaux, bloquer la hausse des loyers notamment des HLM publics, investir dans des énergies renouvelables et une agriculture de qualité.

A qui profitera l’aéroport de Notre-Dame des Landes ?

La construction de l’aéroport relève d’un keynésianisme imbécile, comme l’est le développement du complexe militaro-industriel et des industries sécuritaires (la Loire-Atlantique y est également en pointe). En premier lieu, en seront bénéficiaires les entreprises de travaux publics, avec un chantier pharaonique. Quant aux emplois créés sur ce type de chantier, puis à son terme, ils sont souvent pénibles, précaires et sous-payés.
Si ce type de « grands travaux » séduit de nombreux salariés et chômeurs, c’est par la promesse d’une hausse des propositions d’emploi. Mais d’emplois stables, on en voit de moins en moins. La flexibilité est devenue la règle du jeu (voir les négociations patronat-syndicats sur le marché du travail). La mobilité géographique est de plus en plus imposée (voir le traitement des demandeurs d’emploi par l’ANPE-ASSEDIC). En parallèle, l’emploi industriel est en berne. Les élites ont définitivement admis le principe d’abandon de sites industriels et les délocalisations, donc fait le choix de l’augmentation des transports intercontinentaux, par bateaux ou par avions. Même le discours de création de « richesses à haute valeur ajoutée » sonne de plus en plus creux.
Qui pourra ou aura envie de se procurer ces richesses ? Cela vous tente une croisière sur le Queen Mary II ? Ou encore, une semaine de vacances en avion à l’autre bout du monde, où tout est fait pour qu’on ne rencontre surtout pas les « vrais gens » ? Manger des fraises en février ? Offrir un bouquet de roses cultivées au Kenya ?

Un aéroport, ça suffit !

Tout cela sera possible avec le « futur » aéroport. Mais qui en a vraiment envie, à part une minorité ? Pour nous, la capacité de l’aéroport actuel est suffisante pour répondre aux besoins des personnes qui ont vraiment besoin de voyager . Le développement de ce genre de trafic, via les compagnies « low-cost » n’est pas souhaitable. Il faut aussi réfléchir sur les formes de tourisme qu’on nous fait miroiter (où le voyage entre un point A et un point B serait un temps mort, à effacer ou rendre le plus rapide possible) et envisager des formes différentes. Et réfléchir à d’autres systèmes économiques non basés sur des spécialisations (l’industrie là, l’agriculture ailleurs, les services ailleurs, le tourisme ailleurs, les « centres de décisions » encore ailleurs), mais centrés au maximum sur les besoins locaux des populations. Nous ne rêvons pas d’autarcie, nous savons les échanges nécessaires à la vie de chacun. Faisons en sorte que ces échanges soient égalitaires !

Pour rester sur « l’exotisme » et les « vrais gens », l’aéroport est aussi un instrument redoutable pour le Sinistre de l’immigration et de l’identité nationale, Brice Hortefeux, sa chasse aux étrangers et ses 25000 reconduites annuelles à la frontière. Car l’avion, c’est aussi l’instrument du Pouvoir pour gérer les allers et retours d’une « immigration choisie » chères à Sarkozy, en clair d’une immigration jetable, de la chair à canon économique. L’aéroport s’accompagnera d’un système policier de tri entre « bons et mauvais immigrés », ainsi que de tout un système de contrôle sécuritaire (biométrie, etc), réduisant finalement la liberté de circulation.

Verts et Alternatifs seraient-ils schizophrènes ?

Verts et Alternatifs nantais se positionnent contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et c’est tout à leur honneur. Cependant, on les retrouve sur la liste de Jean-Marc Ayrault pour les Municipales de Nantes. Ils assument donc aussi la proposition 11 de la profession de foi : « accompagner la décision de l’Etat de construire l’aéroport de Notre-Dame des Landes, en veillant aux équilibres sociaux, économiques et environnementaux locaux » (Amen !) Pour eux, l’affaire est déjà pliée. A eux d’« accompagner » le mouvement… en insérant dans le nouveau paysage des murs anti-bruits ou des bacs à fleurs.

Quelle lutte contre l’aéroport ?

La stratégie des Verts et Alternatifs d’être à l’intérieur du pouvoir local et à l’extérieur (dans la contestation) n’est pas cohérente. La résistance contre l’aéroport ne sera que plus forte, si elle est conduite par un mouvement indépendant des élus locaux. Comme nous l’écrivions en introduction, tout se tient, le social, l’économie, l’environnement. Toute comme la résistance contre le nucléaire, la résistance à cet aéroport et ce qu’il représente est un enjeu majeur. Cette résistance doit entrer en résonance avec d’autres luttes, sociales, écologiques, urbaines et rurales.

Des libertaires de Nantes et ailleurs.