» « Beaucoup de vent » autour du réchauffement climatique »

Les gouvernements du monde ont généreusement financé à travers les Nations Unies la recherche du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) depuis 1990, et leurs médias ont largement divulgué ses conclusions récentes les plus affligeantes.
A leur tour, les principaux partis politiques de la bourgeoisie de tous les pays se parent de diverses nuances de vert. Mais à y regarder de plus près, la politique écologique de ces partis, aussi radicale qu’elle puisse paraître, obscurcit délibérément la gravité du problème parce que la seule solution à y apporter mettrait en cause le système même dont ils chantent les louanges. Le dénominateur commun de toutes ces campagnes « vertes » est d’empêcher le développement d’une conscience révolutionnaire dans une population horrifiée à juste titre par le réchauffement climatique. Le message écologique permanent des gouvernements, c’est que « sauver la planète est la responsabilité de chacun » alors que la vaste majorité est privée de tout pouvoir économique ou politique, de contrôle sur la production et sur la consommation, sur ce qui est produit et comment. Et la bourgeoisie qui, elle, a ce pouvoir de décision, a moins que jamais l’intention de satisfaire les besoins écologiques et humains aux dépens de ses profits.

Al Gore qui a manqué de peu devenir président démocrate des États-Unis en 2000, s’est porté à la tête d’une campagne internationale contre les émissions de carbone avec son film « Une vérité qui dérange » qui a gagné un Oscar à Hollywood pour la façon vivante dont il traite le danger de la montée des températures planétaires, de la fonte des glaces polaires, de la montée des mers et de toutes les dévastations qui en découlent. Mais le film est aussi une plateforme électorale pour Al Gore lui-même. Il n’est pas le seul vieux politicien à prendre conscience que la peur justifiée de la population vis-à-vis d’une crise écologique peut être exploitée dans la ruée pour le pouvoir qui caractérise le jeu démocratique des grands pays capitalistes. En France, les candidats à la présidence ont tous signé le « pacte écologique » du journaliste Nicolas Hulot. En Grande-Bretagne, les principaux partis politiques rivalisent pour être plus « verts » que les autres. Le rapport Stern commandé par Gordon Brown du New Labour a été suivi par plusieurs initiatives gouvernementales pour réduire les émissions de carbone. David Cameron, chef de l’opposition conservatrice, va en vélo au Parlement (pendant que son entourage arrive derrière en Mercedes).

Il suffit d’examiner les résultats des précédentes politiques gouvernementales pour réduire les émissions de carbone pour constater l’incapacité des États à faire preuve d’une quelconque efficacité. Au lieu de stabiliser les émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990 en l’an 2000, ce à quoi les signataires du protocole de Kyoto s’étaient modestement engagés en 1997, il y a eu une augmentation de 10,1% des émissions dans les principaux pays industrialisés à la fin du siècle et il est prévu que cette pollution aura encore augmenté de 25,3% en 2010 ! (Deutsche Umwelthilfe).

Il suffit aussi de constater la totale négligence des États capitalistes envers les calamités qui se sont déjà abattues à cause du changement climatique pour juger de la sincérité des interminables déclarations de bonnes intentions.

Il y a ceux qui, reconnaissant que le mobile du profit constitue un facteur puissant de démotivation dans la limitation efficace de la pollution, croient qu’on peut résoudre le problème en remplaçant les politiques libérales par des solutions organisées par l’État. Mais il est clair, surtout à l’échelle internationale, que les États capitalistes, même s’ils s’organisent chez eux, sont incapables de coopérer entre eux sur cette question car chacun devrait faire des sacrifices économiques de son côté. Le capitalisme, c’est la concurrence, et aujourd’hui plus que jamais, il est dominé par le chacun pour soi.

Le monde capitaliste est incapable de s’unir autour d’un projet commun aussi massif et coûteux qu’une transformation complète de l’industrie et des transports afin de parvenir à une réduction drastique de la production d’énergie brûlant du carbone. Au contraire, la principale préoccupation de toutes les nations capitalistes est de chercher à utiliser ce problème pour promouvoir leurs propres ambitions sordides. Comme sur le plan impérialiste et militaire, sur le plan écologique le capitalisme est traversé par des divisions nationales insurmontables et ne peut donc pas répondre de façon significative aux besoins les plus pressants de l’humanité.
Tout n’est pas perdu pour les prolétaires, ils ont toujours un monde à gagner

Mais il serait tout à fait erroné d’adopter une attitude de résignation et de penser que la société humaine sombrera inévitablement à cause de ces puissantes tendances – l’impérialisme et la destruction écologique – à la barbarie. Face à la fatuité de toutes les demi-mesures que le capitalisme nous propose pour apporter la paix et l’harmonie avec la nature, le fatalisme est une attitude aussi erronée que la croyance naïve en ces cures cosmétiques.

En même temps qu’il sacrifie tout à la course au profit et à la concurrence, le capitalisme a aussi, malgré lui, produit les éléments de son dépassement comme mode d’exploitation. Il a produit les moyens potentiels technologiques et culturels pour créer un système de production mondial, unifié et planifié, en harmonie avec les besoins de l’humanité et de la nature. Il a produit une classe, le prolétariat, qui n’a pas besoin de préjugés nationaux ou concurrents, et qui a tout intérêt au développement de la solidarité internationale. La classe ouvrière n’a aucun intérêt dans le désir rapace de profit. En d’autres termes, le capitalisme a jeté les bases pour un ordre supérieur de la société, pour son dépassement par le socialisme. Le capitalisme a développé les moyens de détruire la société humaine mais il a aussi créé son propre fossoyeur, la classe ouvrière, qui peut préserver cette société humaine et lui faire accomplir un pas décisif dans son épanouissement.

Le capitalisme a permis la création d’une culture scientifique qui est capable d’identifier et de mesurer les gaz invisibles comme le dioxyde de carbone tant dans l’atmosphère d’aujourd’hui que dans celle d’il y a 10 000 ans. Les scientifiques savent identifier les isotopes de dioxyde de carbone spécifiques produits par la combustion des énergies fossiles. La communauté scientifique a été capable de tester et de vérifier l’hypothèse de « l’effet de serre ». Pourtant, elle est loin l’époque où le capitalisme en tant que système social était capable d’utiliser la méthode scientifique et ses résultats dans l’intérêt du progrès de l’humanité. La plus grande partie des recherches et des découvertes scientifiques d’aujourd’hui est dédiée à la destruction, au développement de méthodes toujours plus sophistiquées de mort massive. Seul un nouvel ordre social, une société communiste, peut mettre la science au service de l’humanité.
Malgré les cent dernières années de déclin et de pourrissement du capitalisme et les sévères défaites qu’a subies la classe ouvrière, le soubassement nécessaire pour créer une nouvelle société est toujours intact.

Le resurgissement du prolétariat mondial depuis 1968 en est la preuve. Le développement de sa lutte de classe contre la pression constante sur le niveau de vie des prolétaires durant les décennies qui ont suivi, a empêché l’issue barbare promise par la Guerre froide : une confrontation totale entre les blocs impérialistes. Depuis 1989 cependant et la disparition des blocs, la position défensive de la classe ouvrière n’a pas permis d’empêcher la succession d’horribles guerres locales qui menacent de s’accélérer hors de tout contrôle et d’impliquer de plus en plus de régions de la planète. Dans cette période de décomposition capitaliste, le prolétariat n’a plus le temps pour lui, d’autant plus qu’une catastrophe écologique pressante doit maintenant être ajoutée à l’équation historique.

Mais nous ne pouvons pas dire encore que le déclin et la décomposition du capitalisme ont atteint « un point de non retour » – un point où sa barbarie ne pourrait plus être renversée.

Depuis 2003, la classe ouvrière a commencé à reprendre la lutte avec une vigueur renouvelée, après que l’effondrement du bloc de l’Est a mis momentanément un terme à son resurgissement depuis 1968.
Dans ces conditions de développement de la confiance de la classe, les dangers croissants représentés par la guerre impérialiste et la catastrophe écologique, au lieu d’induire des sentiments d’impuissance et de fatalisme, peuvent conduire à une plus grande réflexion politique et à une plus grande conscience des enjeux de la situation mondiale, à une conscience de la nécessité du renversement révolutionnaire de la société capitaliste. C’est la responsabilité des révolutionnaires de participer activement à cette prise de conscience.

Como – Courant Communiste International