Les Élections isolent de la politique
Le capitalisme : état des lieux

Alors que la croissance mondiale atteint 5% et que les échanges mondiaux (de marchandises) se sont accrus de 30% sur 3 ans, l’économie française se porte mal. Quelques chiffres : déficit record du solde de la balance commerciale de – 24,2% en 2005, explosion de la dette publique à 67% du PIB, pression fiscale qui augmente sur les ménages d’un côté et protège les nantis de l’autre à coup de cadeaux fiscaux (niches fiscales, emplois à domicile, droits de succession, fiscalités plus-values, baisse de l’impôt sur la fortune, stocks options et golden parachutes, …), déficit public de 43 milliard prévu en 2007… La contre partie pour limiter ces déficits publics est l’élévation des impôts fonciers et de la taxe d’habitation, de la CSG, du CRDS, du forfait hospitalier, de l’acte médical à 1 euro et de 18 euros sur acte de plus de 91 euros, augmentation de l’énergie et des tarifs publics, etc., sans oublier la journée gratuite du travail du lundi de pentecôte.

Selon le gouvernement, le chômage serait passé de plus de 3 millions de « demandeurs d’emploi » en 1997 à 2,4 millions en 2006. Mais si l’on tient compte des emplois aidés du gouvernement (610 000 en 2006, autant de cadeaux au patronat pour toujours plus de précarité) et ce que les experts nomment pudiquement « des manipulations comptables » (en fait les radiations en cascades suite aux nouveaux dispositifs de chasse aux chômeurs), le chômage a peu reculé. D’après le Bureau International du Travail (BIT), le chômage réel en France, calculé en équivalent « temps plein », était de 5,7 millions en 1996 et plus de 5,8 en 2005. Pourtant par le jeu naturel de la démographie, il y a eu sur cette période plus de départs en retraite que d’entrées sur le marché du travail. Et ce phénomène va s’accentuer à l’avenir : ainsi c’est 150 000 chômeurs en moins par an qui sont attendus jusqu’en 2016, puis 250 000 ensuite. A l’avenir la machine capitaliste risque même de manquer de bras et de cerveaux !

Part contre, ce qui n’a pas diminué mais au contraire a littéralement explosé ces 30 dernières années, c’est la pauvreté. 5 millions de personnes vivent sous le seuil « officiel» de la pauvreté (dont les RMIstes, passés de 1 millions en 97 à 1,3 millions de RMIstes en 2006). Il y a autant de travailleurs paupérisés et la cohorte de problèmes qui va avec (logement, santé, nourriture, etc.). Les couches moyennes subissent également une érosion de leur niveau de vie. Parallèlement, les bénéfices tant boursiers que ceux des entreprises et les inégalités de revenus n’ont jamais été aussi élevés. Pas une semaine sans que n’éclate un nouveau scandale d’un patron parti avec un golden parachute de plusieurs millions d’euros !

L’économie capitaliste de type fordiste s’est massifiée et mondialisée et les problèmes ont suivi. La condition salariale des pays dits développés, sous l’effet du jeu concurrentiel de la valeur de la force de travail n’a cessé de se dégrader : précarisation, pénibilité au travail, allongement des annuités pour la retraite, etc. Cela va se poursuivre vue la crise structurelle du système et de ses contradictions : crise énergétique (épuisement du pétrole, développement du nucléaire, épuisement des matières premières), crise écologique (pollutions de l’air, de l’eau, réchauffement climatique, dissémination nucléaire), crises sanitaires (OGM, cancers, épidémies : vache folle grippe aviaire), crises sociales liées à la mise en compétition des travailleurs entre eux au niveau mondial. Pour conserver leurs marchés et leurs approvisionnements, contrôler les flux migratoires, mater leurs opposants, les États deviennent de plus en plus agressifs. Les conflits armés vont se multiplier et l’impérialisme sera décomplexé. Les populations (y compris celles des États dits « développés ») sont soumises à des logiques liberticides grâce au triomphe de la bio-politique, via la biométrie, vidéo surveillance. La soi-disant « lutte anti-terroriste », permettant en fait le fichage des populations (patriot-act aux USA et ses copies conformes en France les lois de Sécurité Quotidienne et loi dite de Prévention de la Délinquance) a de beaux jours devant elle. Les nouvelles technologies donnent à la police – et donc à l’État – des pouvoirs de contrainte jamais égalés.

Le formatage comportemental réactionnaire tente de faire culpabiliser l’individu et d’exiger de lui une obéissance aveugle de type «bête et discipliné ». Nul ne doit s’interroger sur la nature véritable du système en place. L’idéologie de la bourgeoisie triomphe : le chacun pour soi afin d’accéder au mirage de la réussite sociale ; et l’intériorisation des rapports d’exploitation et d’oppression conditionnent les consciences. Les valeurs originelles du socialisme (la Liberté, l’Egalité, la Fraternité, la Justice et la Solidarité) seraient aujourd’hui de vaines illusions passéistes et infantiles. Résultat : la personne humaine est elle-même devenue une marchandise dans les rapports de production/consommateur. Ce processus de réification nous réduit à des éléments comptables (dépense, recette, balance commerciale, pouvoir d’achat, PIB, etc.). L’être humain se retrouve de fait sans éthique donnant un sens à sa vie. Il se voit privé de bonheur et acculturé. Les violences multiples s’avèrent du coup notre lot quotidien et il en résulte de la souffrance, du mal être, dont la continuité peut entraîner un devenir pathologique chez certains.

Élections partout : démocratie nulle part

Ces élections présidentielles n’annoncent aucun changement dans ce tableau. La droite continuera ses attaques et la gauche déclamera ses grands principes abstraits. Nous constatons que les gouvernements successifs, de droite et de gauche en passant par les coalitions, font tous des choix identiques, tant ces nantis n’ont qu’un but : sauver leurs privilèges. Juste un exemple : les indemnités des ministres et des élus et parlementaires : un maire jusqu’à 5165 euros, le premier adjoint jusqu’à 2582 euros, un conseillé régional jusqu’à 3615 euros, un ministre plus de 10 000 euros. Et ce sans compter les petits avantages en nature … Le canard enchaîné à d’ailleurs révélé récemment que dans les cinq dernières années, les salaires des élus avaient augmenté de plus de 10%. On aurait aimé que ce soit pareil pour les salaires, les retraites et les minimums sociaux …

Mais il existe d’autres sources de financement pour les partis politiques : certes il y a les dons, notoirement insuffisants (et qui ont surtout pour intérêt de faire bénéficier aux « généreux donateurs » de substantielles réductions d’impôts : 4500 euros pour chaque élection et 7500 euros aux partis par année). Mais surtout, il ne faut pas oublier que chaque voix exprimée rapporte 1,70 euros au candidat. Et que les frais de campagne sont intégralement remboursés pour les partis qui dépassant les 5% des suffrages exprimés.

Les syndicats aussi n’échappent pas à cette règle ; eux aussi vivent de dons, d’indemnités et de subventions puisqu’ils siègent dans les instances paritaires (ce partenariat de la cogestion). C’est ainsi que des sommes colossales sont en jeu, mais jamais d’informations à ce sujet au JT ou ailleurs ….

En fait, les élus ne font pas œuvres d’intérêt public parce qu’ils se rattachent à la technostructure et monnaient chèrement leur présence. La république, dont l’étymologie nous renvoie à la chose publique, a été dénaturée par les politiciens : ils l’ont privatisé. Il en va de même avec l’idée de « Démocratie », « pouvoir pour et par le peuple », que ces technocrates, dans de fictifs et pédants débats, ont rendu incompréhensible pour le « citoyen-électeur ». A contrario, ils passent outre (référendum sur l’Europe). Sénat, chambre des députés, collectivités territoriales en tout genre (conseil régional, conseil général, municipalités), comité d’entreprise ou économique et social, conseils en tout genre… ces structures dans lesquelles les élus et les représentants siégent, afin d’élaborer les choix politiques et l’administration de la société, sont autant de parlements qui tirent leur légitimité d’élections qu’on nous fait passer pour de la démocratie. Pourtant son absence est flagrante : on n’y retrouve sociologiquement que les bourgeois et les chefferies issues des partis et syndicats. Tout ce beau monde ne vise qu’à protéger ses intérêts et à perpétuer ce système inégalitaire, hiérarchisé, exploiteur, etc.

L’individu lambda a peu de chance d’être élu vu son manque de moyens logistiques et surtout d’appui financier …, sa méconnaissance des règles électorales et l’obstruction des partis politiques (les 500 parrainages par exemple). S’il obtient d’aventure un mandat au sein d’une de ces structures et qu’il en prend le contrôle (maire d’une commune par exemple), il ne fera aucun doute qu’une coalition se formera et ordonnera aussitôt son isolement par toutes les autres structures qu’il ne régit pas : intercommunalité, département, région, État, Europe, etc. La justice et le fisc seraient également mobilisés, sans oublier l’utilisation de l’intimidation et de la calomnie qui s’avèreront des armes redoutables pour détruire sur tous les aspects notre doux rêveur. Au pire, ce dernier finira comme tous ceux qu’il prétendait dénoncer la veille, en intégrant les us et coutumes de cette mécanique institutionnelle. Celle-ci ne se laisse pas faire sans réagir.

Mais les institutions possèdent aussi la capacité de se détacher et de s’autonomiser du reste de la société, et de se pérenniser par un recrutement dans les hautes écoles, entretenant ainsi le népotisme. Or, l’histoire nous enseigne que cette machinerie ne se change pas de l’intérieur. C’est la foule la contestant qui l’abolit pour en ériger le plus souvent une nouvelle de l’extérieur. On appelle ce processus un changement de régime ou de république. Et dans certains contextes ce processus extérieur peut même se poursuivre jusqu’à l’éclosion d’une dynamique révolutionnaire : Russie 1917, Allemagne 1918-19, Italie 1920, Espagne 1936-39, Hongrie 1956… et l’espoir est là.

Contre la résignation : résistance populaire autonome

Nous devons rompre avec l’isolement, l’atonie, afin d’échafauder sur nos lieux de travail et d’habitation une multitude de comités de lutte. Exigeons dès maintenant des droits de qualité pour tous, fondés sur l’accès au transport, au logement, à la nourriture, à la santé, etc. Finissons en avec cette idéologie oppressive qu’est le capitalisme et ses dérivés, engendrant misère, indigence et sauvagerie…

Faisons fonctionner ces comités de lutte selon les principes suivants : un individu égal une voix, rotation des tâches, mandatés révocables… et plaçons-les en dehors de la machinerie institutionnelle. Agissons pour qu’ils se développent, se massifient et se fédèrent horizontalement et qu’ils deviennent des réseaux fortifiés, ne se limitant pas qu’à endiguer l’attaque du système.

Les anarcho-syndicalistes appellent tout cela la résistance populaire autonome basée sur la démocratie directe. La résistance populaire autonome utilise l’action directe qui se manifeste sous plusieurs aspects : occupation, boycottage, autoréduction, manifestation sauvage, etc. ; l’action directe va de pair avec la désobéissance civile. Le but des anarcho-syndicalistes est que la résistance populaire autonome parvienne à défaire ce système pour le changer par un autre plus juste, égalitaire et pacifique.

Nos aïeuls, des sans-culottes aux communards tentèrent cette expérience, jusqu’à nos aînés de 1936 et 1968, qui usèrent de la grève générale si chère aux anarcho-syndicalistes ; le mouvement de lutte contre la précarité (CPE/CNE) l’a remis en prémisse.

Un totalitarisme en cache un autre